OPÉRATION PRESBYTIE : LASER OU IMPLANTS ?

Opération presbytie. Laser ou implants

La chirurgie de la presbytie Lasers ou implants ? Les éléments décisionnels

M. TIMSIT

 

Réalités ophtalmologiques. Edition spéciale avril 2015

Voir aussi :

Chirurgie de l'hypermétropie

Chirurgie de la presbytie

La demande de suppression des lunettes est de plus en plus fréquente, en particulier chez les presbytes subissant ce handicap inéluctable et indésirable du vieillissement. De plus en plus actifs et considérant que l’ordinateur n’est pas l’apanage des jeunes, ils souhaitent une indépendance totale ou partielle aux lunettes et un gain d’autonomie. Satisfaire ce souhait n’est pas une faculté nouvelle; cela remonte à trois décennies pour certaines méthodes, et la panoplie thérapeutique s’est beaucoup étoffée avec le temps. Une opération de la presbytie réussie donne d’immenses satisfactions. Cela rend d’autant plus cruciale la question, posée quotidiennement au chirurgien, du choix le plus judicieux parmi les multiples techniques de laser et les différents implants. Influencé par son entourage ou les médias, le patient consulte souvent avec une idée préconçue. Il est alors essentiel de clarifier sa réflexion et de l’impliquer dans la décision thérapeutique par des explications claires et détaillées. Le rôle du chirurgien maîtrisant les différentes techniques et leurs résultats est de l’orienter vers une solution “à la carte”, optimale en terme d’efficacité, de confort et de sécurité.

LES OBJECTIFS DE LA CHIRURGIE DE LA PRESBYTIE

Le but est d’obtenir une autonomie sans lunettes à toutes les distances, en vision de loin éloignée (conduite), et vision de loin (sports), vision intermédiaire éloignée (télévision), vision intermédiaire rapprochée (ordinateur), et pour la lecture. Cet objectif est très souvent atteint, tous les défauts réfractifs étant actuellement abordables. Mais cette chirurgie est délicate et nécessite une soigneuse étude préalable. Elle ne peut être qu’une chirurgie personnalisée adaptée à chaque cas, modulée en fonction des besoins visuels du sujet. Il y aura satisfaction du patient s’il obtient un résultat personnalisé, en fonction de son mode de vie (sédentaire ou actif, professionnel, conduite, loisirs, sports) et de ses distances de vision prioritaires. Les réponses à un questionnaire détaillé guident la meilleure solution, le patient étant placé au centre d’un processus décisionnel éclairé.

La diversité des traitements actuels offrant une multitude de possibilités, l’optimisation de la vision reste la préoccupation primordiale. Avec une technique adaptée, la majorité des opérés ne porte plus de lunettes, ou seulement de façon occasionnelle. Cela s’obtient souvent au prix d’un compromis entre efficacité et altération inévitable de la qualité de vision (en règle modérée et acceptable avec les techniques actuelles). Une baisse modérée d’acuité visuelle de loin à un œil, d’importance et de durée variable, est souvent le prix à payer pour récupérer une vision de près. Le curseur du compromis doit être expliqué, ajusté en fonction des exigences visuelles, et accepté. Le patient doit être prévenu que le résultat n’est optimal qu’avec une vision binoculaire, lorsque les deux yeux sont opérés. Et que la vision étant un processus cérébral autant qu’oculaire, ce résultat s’améliore de façon progressive en quelques semaines, par une neuroadaptation variable avec l’âge et le degré de dominance oculaire.

LES CONTRE-INDICATIONS

Une contre-indication peut d’emblée récuser le laser, l’implant ou les deux techniques.

Contre-indications générales

La chirurgie de la presbytie n’est envisageable que s’il n’existe pas de maladie évolutive oculaire (glaucome, neuropathie, DMLA), de maladie générale pouvant retentir sur la vision (diabète) ou d’amblyopie. Elle est plus complexe s’il existe une chirurgie oculaire préalable, en particulier cornéenne. Il faudra considérer avec précaution les sujets perfectionnistes aux attentes démesurées (indépendance absolue des lunettes et qualité de vision parfaite), non réceptifs à la notion de compromis, et les sujets exposés à des contraintes visuelles exigeantes : pilotes, jurisprudence aéronautique, conducteurs professionnels, conducteurs de nuit, métiers ou occupations nécessitant une lecture prolongée, travail de haute précision, etc.

Contre-indications oculaires

Il faut considérer l'ensemble des paramètres suivants sans en oublier un seul.

la fonction binoculaire, qui doit être préservée : bilan orthoptique surtout en cas d’antécédents orthoptiques et de strabisme,recherche d’une micro-déviation, étude de l’angle Kappa;
– la cornée, avec une pachymétrie et une topographie cornéennes. Une cornée trop fine, un kératocône fruste peuvent contre- indiquer le Lasik. Une irrégularité cornéenne peut contre-indiquer un implant progressif ;
– le film lacrymal : intérêt de l’étude par l’OQAS de la “PSF tear”. La sécheresse oculaire, plus fréquente après 50 ans et chez la femme, devra être prise en charge. Une déficience lacrymale importante peut contre-indiquer une chirurgie cornéenne par laser ;
– la qualité de la surface cornéenne : intérêt de l’étude de la topographie cornéenne et de l’aberrométrie, de l’étude à l’OQASde la fonction d’étalement d’un point (PSF) et de la fonction de modulation de transfert (MTF) ;
– la taille de la pupille : une pupille photopique trop étroite (inférieure à 3 mm) peut constituer une contre-indication au laser ou à l’implant ;
– la transparence du cristallin, en particulier chez le myope de la cinquantaine ou le presbyte de la soixantaine. Un début d’opacification contre-indique une chirurgie cornéenne. On accordera un intérêt particulier à l’étude de l’indice de diffusion lumineuse OSI par l’OQAS. En cas de doute, la comparaison avec un deuxième examen ultérieur permet d’en apprécier l’évolutivité ;
l’existence ou non d’un décollement postérieur du vitré (intérêt de l’échographie B). S’il n’est pas déjà présent, le risque de décollement de rétine après implant est plus important, de même que le risque d’œdème maculaire. Le laser est alors plutôt conseillé ;
– la macula doit être normale (importance de l’OCT rétinienne pour éliminer en particulier une membrane épimaculaire débutante).

LES DIFFÉRENTES MÉTHODES

La monovision

est la technique la plus ancienne. Appliquée depuis de nombreuses années aux lentilles de contact, à la chirurgie de la cataracte et à la chirurgie cornéenne au laser, elle consiste à corriger parfaitement l’œil dominant en vision de loin et à favoriser la vision de près à l’œil dominé par le maintien volontaire d’une myopie, variable selon les sujets, destinée à compenser la presbytie.

Indications : les meilleures indications sont l’opération de la myopie par laser à l’âge de la presbytie débutante et les opérations de myopie par implants (qu’ils soient phakes ou implantés lors de l’opération de la cataracte). La monovision peut aussi être appliquée, de façon modérée, aux opérations de presbytie chez l’hypermétrope. Elle est souvent mal tolérée chez le patient emmétrope.

Avantages : la monovision est une technique prédictible, sûre, ajustable par une retouche facile. Elle préserve une bonne qualité de vision (pas de halos ni d’éblouissement, peu de modifications de la perception des contrastes). La vision est acquise dès les premiers jours postopératoires sans perte d’acuité visuelle binoculaire.

Impératifs : pour donner satisfaction, la monovision impose de bien déterminer l’œil choisi pour la vision de loin et celui choisi pour la vision de près. On choisit en général, pour la vision de près, l’œil pour lequel la sous-correction est la mieux supportée en vision binoculaire. Mais l’inverse, avec l’œil dominant pour la vision de près, peut aussi être un choix judicieux. En ce qui concerne l’œil dominant, la vision de loin ne reposant que sur cet œil, il faut une correction parfaite, en particulier de l’astigmatisme. La satisfaction du patient, qui demande à retrouver une vision optimale de loin, en dépend. En ce qui concerne l’œil dominé, il faut un dosage très précis de la correction à effectuer.
– Si la sous-correction est trop faible, le résultat sur la presbytie sera décevant ou ne sera pas durable, et le sujet devra reporter tôt ou tard des lunettes pour lire. Cette limitation peut rendre la monovision insuffisante pour compenser une presbytie complè-tement installée chez un myope plus âgé.
– Si la sous-correction est trop importante, il risque d’y avoir trop de différence entre les deux yeux : engendrant inconfort, fatigue oculaire, altération des performances visuelles pour les tâches complexes, trouble de la vision stéréoscopique (responsable d’une perte de la vision du relief pénalisant les activités en 3D) et mauvaise appréciation des distances. Une simulation préalable est possible par le port d’une lentille. La neuroadaptation permet d’améliorer le confort au bout de quelques semaines. Des verres correcteurs additionnels sont parfois nécessaires pour éviter la fatigue visuelle en lecture prolongée ou pour améliorer les performances visuelles de loin.

Le presbyLASIK

Il crée une multifocalité cornéenne par application du laser sur la cornée Le principe est basé sur le partage de la lumière en plusieurs foyers avec des zones transitionnelles. Le changement de courbure de la cornée entraîne une augmentation de la profondeur de champ. Le cerveau reçoit plusieurs images en vision de loin, intermédiaire et de près, et fait le tri selon la distance. La zone de près est habituellement au centre de la cornée. Cette zone est très étroite en cas de traitement hyperprolate. Un traitement varifocal vise une transition progressive entre la zone de correction de loin et la zone de correction de près.

Impératifs : Le presbyLASIK exige actuellement un laser femtoseconde pour la découpe d’un volet cornéen précis, reproductible, large (supérieur à 9 mm) et bien centré. Elle est suivie d’une optimisation précise du traitement par le laser Excimer, de préférence asphérique pour une meilleure qualité de vision. Chaque constructeur a ses propres algorythmes de correction de la presbytie, des spécificités et des résultats différents. Qu’il s’agisse d’un traitement bizone : Baush + Lomb, Technolas Perfect Vision (Supracor Regular ou Mild), Schwind (PresbyMax) ; ou d’un traitement modifiant globalement l’asphéricité cornéenne : Wavelight Allegretto (F-CAT), Zeiss (LBV laser blended vision), VisX (Custom Vue), Nidek (Module Presbytie). Le même programme ne pouvant évidemment pas convenir à tous les cas de façon optimale, le chirurgien doit choisir et maîtriser le logiciel approprié, car la précision réfractive est fondamentale, beaucoup plus que pour un traitement conventionnel.

La stabilité du résultat n’est obtenue qu’au bout de plusieurs semaines. Les résultats et leur durabilité dans le temps dépendent beaucoup de l’expérience du chirurgien ; un retraitement ultérieur en cas de besoin est possible mais plus difficile. Les nouveaux programmes de laser multifocaux, accentuent l’asphéricité cornéenne. Cette modification de l’asphéricité cornéenne génère des aberrations sphériques négatives (Z400) augmentant la profondeur de champ. Le corollaire est la réduction de la qualité de vision, en particulier de la vision des contrastes, et la possibilité de halos nocturnes. Ces effets secondaires sont d’autant plus présents que l’on recherche une meilleure vision de près, donc une plus grande multifocalité. Le défi est donc d’obtenir l’asphéricité optimale, améliorant la vision de près sans dégrader la vision de loin. C’est l’intérêt de l’association :
– pour l’œil dominant : d’un traitement monofocal ou d’un traitement à multifocalité modérée pour préserver la vision de loin ;
– pour l’œil dominé : d’un traitement multifocal avec un certain degré de monovision pour obtenir une bonne profondeur de champ et une bonne vision de près.Cette association permet de garder le meilleur de chaque traitement et de ne maintenir qu’une faible monovision. La différence entre les deux yeux est mieux tolérée, car plus faible que dans une monovision pure.

Indications : L’hypermétrope-presbyte est le meilleur candidat au presbyLASIK, jusqu’à 55-60 ans. Les progrès récents permettent de corriger les sujets emmétropes, voyant bien deloin, et les myopes.

L’Intracor

C’est un traitement multifocal, la plupart du temps unilatéral, par un seul laser femtoseconde effectuant des incisions circulaires dans l’épaisseur de la cornée, pour accentuer sa courbure centrale et compenser ainsi la presbytie. Il pose la question clé du centrage, difficile. Ses résultats sont inconstants, pouvantnécessiter des réinterventions délicates. L’Intracor est destinéau sujet faiblement hypermétrope et faiblement astigmate. Ilest en grande perte de vitesse en raison de l’inconstance de ses résultats et du risque de décentrement.

L’implant progressif

Cette lentille intraoculaire multifocale remplace le cristallin, qu’il soit clair (PreLEx) ou qu’il existe une cataracte. La chirurgie de la cataracte peut donc être considérée actuellement comme une chirurgie réfractive. Les implants actuels bénéficient des grandes innovations en matériaux et en optique (asphéricité, apodisation) qui ont beaucoup réduit leurs inconvénients. Chez un patient bien informé, les effets indésirables (halos nocturnes, vision parfois un peu moins contrastée notamment en faible intensité lumineuse, éblouissement en lumière vive) sont la plupart du temps bien tolérés et la qualité de vision satisfaisante. Ces implants nécessitent un bon éclairage pour la vision de près.

Indications : Tous les défauts de la vision peuvent bénéficier d’un implant multifocal. L’hypermétrope-presbyte est le meilleur candidat à l’opération. Pour le myope, le calcul précis de l’implant est plus difficile en cas de myopie forte. En cas d’astigmatisme, le résultat de l’implant progressif risque d’être moins bon. Il faudra alors poser un implant multifocal torique calculé selon l’astigmatisme cornéen et non selon l’astigmatisme réfractif. Un astigmatisme résiduel peut nécessiter une intervention secondaire par laser (Lasik ou PKR) avec une reconnaissance irienne précise et un eye-tracker multidirectionnel et rota tionnel). Chez un sujet déjà opéré de la cataracte avec un implant monofocal, un implant progressif additionnel peut être placé en piggy back dans le sulcus.

Impératifs : Les résultats des implants progressifs sont très bons à condition de respecter des règles essentielles : il n’y aucun droit à l’erreur. Respect des contre-indications, calcul précis de la puissance de l’implant, réalisation chirurgicale parfaite avec une microincision, capsulorrhexis et implant bien centrés, nettoyage capsulaire complet et bonne correction de l’astigmatisme : par le placement de l’incision s’il est modéré, par un implant torique s’il est plus important.

Le choix optimal de l’implant selon les besoins visuels est fondamental.

● Les implants réfractifs permettent une bonne qualité de vision de loin, une bonne vision intermédiaire, au prix d’une moins bonne vision de près. Leur performance dépend en général du diamètre pupillaire et ils sont sensibles au décentrement qui altère leurs qualités optiques. Ils sont très peu utilisés, sauf l’implant réfractif MPlus qui privilégie la vision éloignée, une bonne vision des contrastes et la profondeur de champ.

Les implants diffractifs, de loin les plus utilisés, peuvent être bifocaux. Ils donnent alors une bonne vision de loin et pour la lecture, mais parfois une moins bonne vision intermédiaire. Ils sont peu sensibles au décentrement. L’addition de près est différente en fonction des implants (addition de 2 à 3 dioptries). Les implants de faible addition sont plus adaptés à la conduite nocturne (MPlus Comfort, Restor +2,50). La vision de près est alors moins bonne. Les implants diffractifs bifocaux d’addition plus forte permettent une meilleure vision de près au prix d’une moins bonne vision intermédiaire (Zeiss ATLISA 809, Restor addition+3, Tecnis Multifocal). Les implants diffractifs peuvent être trifocaux (Physiol FineVision ou Zeiss ATLISA Trifocal 839), un peu moins performants de loin et de près mais meilleurs en vision intermédiaire.Le choix parmi les nombreux implants progressifs de spécificités différentes est conditionné par les besoins du patient. Pour un choix judicieux, il est important de connaître la courbe de défocalisation à l’OQAS des différents implants du marché. Elle permet de comparer les performances de chaque implant pour chaque distance de visionIl est possible de poser un implant différent à chaque œil de façon à ce que leurs propriétés se complètent, en particulier pour améliorer la vision intermédiaire (mix and match). Par exemple, un implant diffractif bifocal peut être utilisé à un œil et un implant diffractif trifocal à l’autre.
Après intervention, l’opacification de la capsule postérieure du cristallin survient d’autant plus tôt que le patient est plus jeune. Elle est rapidement pénalisante, imposant une capsulotomie au laser Yag. Un œdème maculaire peut aussi pénaliser la vision et doit être diagnostiqué par une OCT maculaire et traité.

Les implants accommodatifs

Apparus il y a quelques années, ils réalisent une pseudo-accommodation par l’aptitude à se déplacer dans le sac capsulaire sous l’action du muscle ciliaire. L’indication d’un implant accommodatif est un patient moins exigeant en vision de près et craignant les effets secondaires des implants progressifs. De nouveaux concepts d’implants accommodatifs sont en cours d’évaluation, mais leur niveau de performance est inférieur à celui des implants multifocaux diffractifs et dépend de la fibrose du sac et de son opacification au contact de l’implant. Ils sont de ce fait peu utilisés en Europe.

L’inlay ou lenticule intracornéen

C’est une toute petite lentille glissée au sein même de la cornée à un œil, l’œil dominé, en monovision. Il est implantélors d’un Lasik ou après création d’un poche intrastromale au laser femtoseconde. Il permet la lecture par un orifice central de petit diamètre :selon le principe du trou sténopéique (Acufocus Kamra, leplus diffusé, ayant reçu l’agrément CE), ou par les propriétés optiques de la lentille qui modifie la courbure de la cornée(Raindrop ou Flexivue).Ces inlays sont peu pratiqués en France. Toujours en évaluation,le recul sur leur tolérance au sein de la cornée est encore faible.Leur avantage est la réversibilité. Leurs perspectives reposentsur l’amélioration de la précision de leur centrage.

CHOIX D’UNE OPÉRATION DE PRESBYTIE EN FONCTION DE L’AMÉTROPIE

Le choix varie selon de nombreux critères (âge, métier, occupations, exigences visuelles, état du cristallin et du vitré, astigmatisme associé). L’un des critères les plus importants est l’état réfractif de départ, selon que le sujet est hypermétrope, myope, ou présente une bonne vision de loin.

1- L’opération de la presbytie associée à l’hypermétropie

En général, alors qu’il avait une bonne vision avant la quarantaine, ce patient voit sa vision se dégrader rapidement de près et de loin : le handicap de la presbytie s’ajoutant au handicap dû à l’hypermétropie. L’hypermétrope-presbyte est le meilleur candidat à l’opération.

Le choix d’une opération par laser ou par implants varie en fonction de plusieurs paramètres.

● L’âge est un élément de décision important entre laser et implant. L’implant n’est pas indiqué en dessous de 55 ans pour deux raisons. L’une est que l’accommodation est encore efficace, il est donc souhaitable de la préserver. L’autre est le risque accru de décollement de rétine et d’œdème maculaire postopératoire, le vitré n’étant pas encore décollé. Le laser est donc plus indiqué chez l’hypermétrope jeune avant 55 ans. Après 55 ans, les indications de la chirurgie cornéenne au laser se réduisent. Après 60 ans, quand l’accommodation a quasiment disparu, l’implant est plus logique.

● La réserve d’accommodation du sujet diminue avec l’âge. Si les performances accommodatives sont faibles, l’implant est plutôt indiqué. Il est utile alors d’étudier le tracé de la courbe de défocalisation par l’OQAS, qui permet d’apprécier l’accommodation résiduelle simulée et le parcours d’accommodation (fig. 5 et 6).

● Le vieillissement du cristallin. Un début d’opacification, quantifié par l’OQAS, oriente vers l’implant de façon à ne pas avoir à réintervenir quand la cataracte se complètera.

● Le degré d’hypermétropie. L’efficacité du presbyLasik est limitée chez l’hypermétrope faible chez qui la création d’une multifocalité par laser est plus difficile. Il est plus efficace si l’hypermétropie est notable. Une hypermétropie faible (de 0.75 à 2.50D) nécessite un traitement hyperprolate type presbyLasik, dans le but de créer une différence de puissance très rapidement atteinte entre la cornée centrale et la cornée paracentrale (fig. 7). En cas d’hypermétropie supérieure à 3 dioptries le presbyLasikn’est pas nécessaire. Un simple traitement hypermétropiquesuffit à créer une multifocalité suffisant à la correction dela presbytie. (fig. 8). La recette pour améliorer encore cette vision de près est de corriger l’hypermétropie saturée à l’œil dominant et de créer une petite monovision entre les deux yeux. L’implant est réservé aux hypermétropies très importantes,le laser pouvant entraîner dans ce cas des effets secondaires délétères.

Avantages et inconvénients du laser et des implants(PreLEx) chez le sujet hypermétrope après 55 ans

Avantages du laser

Il s’agit d’une chirurgie cornéenne de surface, non invasive, sansmanœuvre endoculaire. Les deux yeux peuvent être opérés en même temps. Les retouches sont moins lourdes (pour une sur ou sous-correction), simples par resoulèvement du capot, non intraoculaires. Les résultats varient avec l’expérience du chirurgien, mais dans l’ensemble le presbyLasik donne une vision de loin et de près similaire aux implants multifocaux, avec moins de gênes diurne (éblouissement) et nocturne (halos), une meilleure sensibilité aux contrastes, une meilleure vision intermédiaire.

Inconvénients du laser

Les indications sont plus restreintes. Un astigmatisme important contre-indique le presbyLasik. La précision réfractive est moindre. Il n’y a pas de garantie d’une indépendance totale et définitive vis-à-vis des lunettes en vision de près. La durabilité du résultat dans le temps, quand la presbytie évolue, dépend de l’expérience du chirurgien. Il faudra plus tard opérer la cataracte. Les complications potentielles du Lasik sont surtout la sécheresse oculaire fréquente, les complications sérieuses étant exceptionnelles (DLK, invasion épithéliale, infection, ectasie).

Avantages du PreLEx

Les indications sont plus larges, toutes les amétropies régulières sphérocylindriques sont accessibles. Les résultats sont plus précis, plus prédictibles. Les erreurs réfractives éventuelles sont corrigibles par une opération complémentaire cornéenne par laser. La vision binoculaire est équilibrée, sans monovision. La vision de près des deux yeux est bonne, elle sera définitive avec le temps. Le taux d’indépendance des lunettes et la satisfaction sont globalement plus élevés. L’implant évite d’être opéré plus tard de la cataracte.

Inconvénients du PreLEx

Il s’agit d’une chirurgie endoculaire, relativement plus inva-sive, avec des complications possibles mais très rares (endophtalmie, œdème maculaire, décollement de rétine). Les deux yeux doivent être opérés séparément. Les effets secondairesinduits sont plus importants qu’avec le laser, mais plus modérés qu’auparavant, du fait de l’amélioration des matériaux. Ils s’atténuent avec le temps : éblouissement, sensibilité à la lumière, halos nocturnes, gêne à la conduite nocturne, baisse de vision des contrastes, baisse des capacités visuelles quand la lumière ambiante diminue. Il y a parfois nécessité d’une correction complémentaire par lunettes en vision intermédiaire. Les reprises chirurgicales sont plus rares avec les implants, mais plus invasives. Une incertitude demeure quant à la tolérance future en cas de DMLA.

2- L’opération de la presbytie associée à la myopie

Il s’agit d’un sujet myope proche de la quarantaine qui désire une chirurgie de sa myopie, ou d’un sujet à l’âge de la presbytie, ne pouvant plus lire confortablement avec ses verres de loin et devant passer aux verres progressifs. La lecture est bonne sans lunettes ; il désire bien entendu conserver cet avantage le plus longtemps possible. Si la myopie est parfaitement corrigée aux deux yeux, il ressentira le besoin de lunettes pour lire vers 45 ans. Il est donc important, lors de la chirurgie de la myopie, d’empêcher ou de retarder cette nécessité. 
Plusieurs techniques peuvent être utilisées.
– Monovision lors d’une opération de myopie par Lasik, bonne indication chez le myope jeune.
– PresbyLasik à l’œil dominé, l’œil dominant étant corrigé de sa myopie par un Lasik classique.
– Mise en place d’un inlay intracornéen à l’œil dominé après correction de la myopie par Lasik.
– Implant progressif chez le myope de plus de 60 ans. On choisira plutôt les implants bifocaux à prédominance loin et près.

Cas particulier : la chirurgie par implants du myope fort, presbyte

● Si le cristallin est clair, il est admis d’éviter une chirurgie par un implant remplaçant le cristallin chez le myope jeune avant 60 ans, en raison du risque accru de décollement de rétine sur ce terrain, avant le décollement postérieur du vitré. Dans ce cas une monovision peut être proposée avec un implant phaque de type ICL (en sachant qu’à cet âge l’évolution vers une cataracte dans les années qui suivent est plus fréquente), ou un implant de type Artisan, clippé à l’iris avec une surveillance endothéliale régulière.

● Un début d’opacification du cristallin, plus précoce chez le myope fort, oriente vers son remplacement par un implant, de façon à ne pas réintervenir ultérieurement quand la cataracte se complètera. Très utile, l’examen de l’OQAS, au besoin répété, apprécie l’importance et l’évolutivité de cette opacifi-cation. Il est prudent d’attendre que le décollement du vitré soit constitué pour limiter le risque de décollement de rétine. De même, il faut traiter préalablement les lésions rétiniennes périphériques dangereuses, par laser argon. 
On peut alors utiliser des implants monofocaux avec une monovision soigneusement étudiée avant l’intervention pour éviter tout inconfort. Les implants multifocaux sont aussi envisageables. Il faut alors choisir parmi les implants diffractifs celui qui donne une bonne vision de près. Le calcul précis de l’implant est plus difficile en cas de myopie forte. Il faut alors prévoir, du fait de cette imprécision réfractive, une intervention complémentaire par laser cornéen. Les implants multifocaux sont contre-indiqués en cas d’atteinte maculaire, plus fréquente chez le myope fort (importance de l’OCT rétinienne).

4- L’opération de la presbytie chez le sujet voyant bien de loin

Il s’agit d’un sujet emmétrope ou faiblement hypermétrope (+0.25 à +0.75D) ou d’un myope déjà opéré. Chez ces sujets très exigeants ll est important dans ce cas de ne pas chercher seulement à obtenir la lecture sans lunettes, mais aussi de ne pas nuire à sa vision de loin. En effet, toute chirurgie de la presbytie chez ces sujets se fera peu ou prou aux dépens de la vision de loin.C’est alors que l’explication du compromis prend toute son importance, pour que le patient diminue son niveau d’exigence s’il désire une amélioration de sa vision de près. Il est prudent de ne pas opérer, par exemple, les sujets très exigeants envision de loin à cause leur métier (pilotes d’avion, conducteurs professionnels) ou conduisant surtout la nuit. Contrairement à ce que pense souvent le patient qui n’a de défaut qu’en vision de près, il s’agit du cas le plus difficile à opérer. Il est réalisable grâce aux progrès de ces dernières années, et nécessite des explications préopératoires longues et détaillées : avec des simulations de résultat, de façon à ce que le sujet prenne sa décision en connaissance de cause.

Le choix du type d’opération peut se résumer ainsi :

Avant 55-60 ans

Il est possible de réactiver, par une chirurgie cornéenne au laser, les facultés d’accommodation mises au repos.
 

● Monovision de faible importance réalisée par un Lasik. On n’opère qu’un œil, l’œil dominé, pour le rendre un peu myope afin de compenser la presbytie. Un test préalable par le port d’une lentille de contact pendant quelques jours peut être à l’œil dominé seulement : dont l’amplitude peut être testée en préopératoire, de façon à ne pas nuire à la vision de loin.
● PresbyLasik
à l’œil dominé seulement : dont l’amplitude peut être testée en préopératoire, de façon à ne pas nuire à la vision de loin. Un traitement hyperprolate de faible diamètre, centré sur la pupille, permet d’accroître la profondeur de champ en préservant relativement bien la qualité de vision. Si l’on décide d’opérer les deux yeux il faudra que l’œil sur lequel reposera la vision de loin soit très bien corrigé, en particulier pour l’astigmatisme, afin que le patient soit satisfait. Si le degré de correction à l’œil dominé est peu important, le patient doit être prévenu de l’éventualité d’une réintervention ultérieure en raison de l’évolution de la presbytie.

● Mise en place d’un inlay intracornéen à l’œil dominé.

Après 55-60 ans


L’accommodation s’effondre. La presbytie augmentant, le handicap visuel devient beaucoup plus gênant, rendant le sujet plus motivé et plus réceptif à la notion de compromis.
● Mise en place d’implants intraoculaires multifocaux après extraction du cristallin clair (PreLEx). Il est important chez ces sujets de choisir un implant privilégiant la qualité de vision de loin à l’œil dominant. Il peut s’agir d’un implant diffractif bifocal, dont l’addition peut varier en fonction des activités du sujet et du montage que l’on prévoit entre les deux yeux. Un implant diffractif trifocal peut être implanté au deuxième œil pour favoriser la vision à mi-distance. Il est possible aussi de proposer un implant multifocal à un seul œil ; il permet un dépannage en lecture courante, mais nécessite une paire de lunette additionnelle pour une lecture prolongée confortable. Si le patient est satisfait de sa vision de loin, l’implantation du second œil peut être envisagée. en vision de loin, la chirurgie doit être parfaite. Le calcul d’implant doit être précis et la correction de l’astigmatisme optimale, au besoin par un implant multifocal torique. Un faible défaut réfractif résiduel (petit astigmatisme ou petite myopie essentiellement) sera mal vécu et peut nécessiter une intervention cornéenne complémentaire par laser. Il faudra donc s‘assurer auparavant de la faisabilité de ce complément d’intervention et prévenir le patient de son éventualité.

● Mise en place d’implants accommodatifs de crainte des effets secondaires, avec une exigence de près plus modeste.

CONCLUSION

Le nombre des techniques chirurgicales visant à corriger la presbytie s’est beaucoup accru ces dernières années, permettant de satisfaire les patients désirant s’émanciper des lunettes. Les clés du succès résident dans le choix optimal de la stratégie thérapeutique, l’information, la qualité de la chirurgie et de l’accompagnement postopératoire.

L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflit d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

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